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Source : livret d’accueil du Manoir

 

La bibliothèque

 

Cette pièce fut le bureau de Joseph Astor puis de son fils Joseph-Georges. Bureau et bibliothèque sont de la deuxième moitié du 19ème siècle. La bibliothèque est très représentative des goûts littéraires de grands bourgeois cultivés et révèle leurs centres d’intérêt : François Guizot, Elisée Reclus, Victor Duruy …  Le pupitre est un bureau de notaire. On pouvait poser les registres sur le pan incliné et l’on écrivait debout. La petite porte à gauche avant de pénétrer dans la chapelle était le confessionnal des comtes de Rosmorduc. Il fut transformé en simple placard par les Astor.

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Ici sont représentées trois générations de Astor.

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Joseph Astor, à gauche de la cheminée, est né dans le Quercy, à Figeac, en 1778. Il était le fils d’un chapelier. C’est le grand-père du donateur. Sa famille était originaire du Languedoc. A quinze ans, il s’engagea dans les armées de la République. Il participa à toutes les campagnes militaires de la France, durant quarante-et-un ans de service, jusqu’à sa retraite comme colonel en 1836. Il avait découvert la Bretagne à l’occasion de sa nomination au grade de chef de bataillon à Brest. Il avait, en 1818, épousé en secondes noces une bretonne, Pélagie Férec, l’héritière du dernier sénéchal de la baronnerie de Pont-L’Abbé, qui s’était enrichi dans le commerce du grain. Tous étaient francs-maçons et anticléricaux. Joseph Astor refusa, en raison de la santé délicate de sa femme, le commandement de la place de Toulon et, mettant un terme à sa carrière, il s’établit à Quimper. Nommé maire de la ville en 1836, il se révéla un remarquable administrateur, souhaitant, selon ses dires, « reconquérir l’air pur » dans sa ville. Son action en matière d’urbanisme et d’assainissement fut à ce niveau remarquable : transfert des abattoirs, obligation de doter les maisons de lieux d’aisance, assèchement des marais, construction de latrines publiques, réglementation sur les porcheries et le fumier. A l’issue de la Révolution de 1848 qui établit la Seconde République, il fut brutalement révoqué par le nouveau régime et mourut peu après.

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Le père du donateur, qui se prénommait également Joseph, est né à Ajaccio en 1824. On peut le voir, sur deux tableaux situés à droite de la cheminée, au début de sa carrière militaire et dans la force de l’âge. Après l’école de Saint-Cyr, il participa comme capitaine à la campagne de Crimée sous Napoléon III et il démissionna de l’armée en 1855. Cette même année, il épousa la fille du notaire Alour Arnoult de Pont-L’Abbé, propriétaire du domaine de Kerazan, et se fixa à Quimper. Déjà conseiller municipal, il fut nommé maire de cette ville en 1870 par le Gouvernement de la Défense Nationale, et constamment réélu jusqu’à sa démission pour raison de santé en 1896. Il fut en 1890 élu sénateur du Finistère. Il était le premier sénateur de gauche de ce département. Il fut jusqu’en 1895 membre du Conseil général du Finistère. A tous ces titres, il participa activement à la vie publique de la Cornouaille jusqu’à sa mort en 1901. Au-dessus de la porte d’accès à la dernière pièce du rez-de-chaussée, on peut voir une toile de Théophile Steinlein (1859-1923), célèbre par ailleurs à l’époque dans le monde de la publicité pour ses dessins de chats ainsi que pour ses engagements dreyfusards. Elle fut achetée par Joseph-Georges Astor. Cette présence permet de préciser qu’en Bretagne, parmi les parlementaires de gauche, en général prudents face à l’Affaire, le sénateur Joseph Astor a lui nettement pris fait et cause pour l’innocence de Dreyfus.

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Son fils était prénommé Joseph-Georges Astor. Né en 1859, il fit des études de droit et se spécialisa, après son doctorat, dans les problèmes pénitentiaires. On lui doit un Essai sur l’emprisonnement cellulaire en France et à l’étranger (1877). Il portait les prénoms de son grand-père et de son oncle. Ce dernier, Georges Arnoult, fut député du Pays bigouden de 1876 à 1885. Handicapé par une surdité, Joseph-Georges Astor ne put se consacrer comme il le souhaitait à la vie publique. Ardent franc-maçon, il hérita du virulent anticléricalisme de son grand-père. Dans la vitrine, une statuette représentant un rat en costume ecclésiastique en est une illustration. Son père et sa mère, à l’inverse, ne manifestaient pas la même hostilité farouche au catholicisme et plusieurs objets, que vous avez pu apercevoir au fil des pièces, rendent d’ailleurs compte de leur piété sincère (crucifix, scènes sacrées, etc …). Ayant choisi de rester célibataire, Joseph-Georges déploya toute son énergie pour améliorer le domaine familial de Kerazan. Il fit en particulier construire les communs et il enrichit la collection d’œuvres d’art en se mettant en contact avec les héritiers des artistes que fréquentaient ses parents.

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A sa mort en 1928, conseillé par son ami peintre Adolphe Déchenaud (1869-1933), qui était membre de l’Institut, Joseph-Georges Astor légua ses biens à l’Institut de France, afin qu’une fondation qui porterait le nom d’Astor soit créée. Déchenaud a peint en 1920 le portrait que vous pouvez voir devant la bibliothèque. Parmi les conditions du legs, figurait l’obligation pour l’Institut de maintenir toutes les pièces dans leur état d’origine et d’ouvrir le Manoir au public « un certain nombre de jours par an ».

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